A l’âge où beaucoup songent déjà à leur retraite future, Gilles Meunier, la cinquantaine, commence un nouveau chemin. Le 1er juillet prochain, à 15h30, il sera ordonné prêtre par Mgr Aubertin en la cathédrale de Tours. Le terme d’un parcours professionnel au service de la jeunesse, mais le début d’une vie toujours donnée aux autres. Gilles livre ici son chemin spirituel, ses choix et ses espoirs pour l’avenir.
On est tenté de vous demander ce qui motive pour « rempiler » à l’heure où beaucoup attendent la retraite ?
Il ne s’agit pas d’un nouveau travail. Être prêtre, c’est véritablement l’aboutissement de ce que j’ai déjà fait dans ma vie.
Quand je travaillais, je disais toujours aux personnes que je côtoyais que je ne faisais qu’un bout de route à leurs côtés. D’ailleurs j’ai toujours eu du mal à me dire, lorsque j’étais éducateur, qu’il s’agissait de ma profession. Ma vocation germait en moi.
Justement, quel a été votre parcours jusqu’aujourd’hui ?
Je suis natif de Bourgogne. Je ne suis pas uniquement resté dans cette région, puisque j’ai exercé comme éducateur de jeunes en Seine-et-Marne. C’est plus tard que je suis arrivé en Touraine pour travailler à la fondation Verdier, un internat accueillant enfants et adolescents.
J’ai vécu mon parcours dans la foi au rythme du scoutisme. J’y suis entré à l’âge de 5 ans comme louveteau et n’en suis sorti que trente ans plus tard en tant que chef. Je n’ai jamais arrêté. J’ai sans cesse eu un pied dans l’Eglise.
C’est à Amboise que vous avez mis les « deux pieds dedans » ?
En Touraine, j’ai en effet été chargé dès le début des années 1990 de différentes missions auprès des jeunes dans la paroisse d’Amboise puis dans ce même doyenné qui couvre également Château-Renault et Bléré. En 1997 j’ai pris une part active à la préparation du grand rassemblement Martinopol. J’étais jusque-là bénévole.
Puis il y a dix ans j’ai franchi le pas : je suis devenu permanent salarié dans l’Eglise. D’abord auprès des aumôneries d’Amboise, puis de la pastorale des jeunes, et enfin à Tours Sud II.
C’est là qu’a germé votre désir de devenir prêtre ?
Je l’ai dit, l’idée est bien plus ancienne. Je l’ai constamment traînée avec moi : j’ai conscience que l’appel m’a été adressé le jour où j’ai commencé à être éducateur professionnel. En Seine-et-Marne j’avais tenté de le faire germer, mais ce n’était peut-être pas le moment.
En revanche, au cours de mes diverses responsabilités dans l’Eglise de Touraine, plusieurs paroissiens ou amis prêtres m’ont un jour posé la question : « Gilles, est-ce que tu as songé à devenir prêtre ? » Mon cheminement intérieur y a trouvé un écho. Puis j’ai rencontré l’archevêque, André Vingt-Trois, qui m’a apporté son soutien. C’est important pour quelqu’un qui se pose la question d’avoir un lieu où parler.
Si vous n’aviez pas eu ces remarques de chrétiens vous n’auriez peut-être jamais été prêtre ?
Effectivement. Sans cet appel des chrétiens je n’en serais pas là. C’est pourquoi je lance un appel à toutes les communautés religieuses que sont les paroisses, un appel à tous les chrétiens pour qu’ils se sentent concernés par les vocations. Ce n’est pas tout de se plaindre de ne pas avoir assez de prêtres, encore faut-il en appeler.
Vous avez ensuite vécu vos cinq années de séminaire à Paris. Quelle en était la raison ?
J’avais un chemin un petit peu à part vu l’âge auquel j’entrais au séminaire et mon parcours dans l’Eglise. Du coup Paris a été la formule idéale. Le supérieur du séminaire a su adapter ma formation. Une autre chose était importante, même si elle n’a pas toujours été facile : la rupture avec mes missions d’avant.
Mais c’est probablement ce qui m’a permis d’entrer pleinement dans cette démarche d’études et d’abandon à moi-même.
Qu’est-ce qui aura marqué votre passage au séminaire ?
Le but de cette formation, ce n’est pas de sortir intact mais de se laisser imprégner par le Christ. Il faut le laisser prendre sa place dans tout notre être. J’ai vécu au cours de ces années une véritable renaissance à moi-même… voire une naissance tout simplement.
Ce 1er juillet vous serez ordonné. Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?
J’ai le sentiment que ma vie d’enfant, d’adolescent, d’adulte prend son sens. C’est elle que je remettrai, dans la paix et la joie, entre les mains du Christ lors de la prostration.
Demeure une grande inconnue : cette vie sacramentelle du prêtre, notamment autour de l’eucharistie. C’est un mystère plus grand depuis que je suis entré au séminaire. Mais il faut accepter d’être dépossédé.
Ce qui me réjouit le plus dans ce ministère, et que j’ai déjà expérimenté depuis mon ordination diaconale en septembre 2006, c’est probablement de rencontrer des gens. Je voudrais que ce soit ma priorité et mon fil rouge dans un agenda souvent bien plein : savoir prendre du temps et écouter. A tous je veux annoncer Celui qui m’envoie et leur redire cette phrase de Thérèse d’Avila choisie pour mon ordination : « Que rien ne te trouble, que rien ne t’effraie. Qui a Dieu ne manque de rien. Dieu seul suffit. »
Photos du site et propos recueillis par Emmanuel ROUXEL